Poetic-Verses from ATHANASE

MEMORIA RERUM (French)


 
« On a laissé la porte ouverte à la nuit,
Pas une âme dans cette cité… »

          Yorgos Thèmelis (1900-1976), Vêtements


Sur l'étoffe vieillie de ta vie, dans ses plis paisiblement ordinaires,
Quelques anciennes gouttes de sang que laissèrent des baisers de soleil !
En quelle année, en quelle saison, en quel jardin ce fut, ô mémoire ?
L'ignores-tu vraiment ou refuses-tu de t'en ressouvenir ?

Mains de soie, lèvres flamboyantes, sourires sereins,
Visage ciselé par les caresses de la plus pure lumière, en quel pays
Vous mourez à présent sous les feuilles d'un automne oublieux ?

Mémoire, soutiens, je te prie, les battements de mon cœur,
Empêche, si tu le peux encore,
Le solennel effondrement des mots probes
Dans l'abîme vertigineux du poème crépusculaire !

Tout est-il fini avant d'avoir commencé,
Tout est-il dit avant d'être dit
Devançant, comme la tristesse,
Le frisson de l'âme en attente ?
 
A Paris, ce dimanche 12 septembre, Anno Christi MMIV

Glose :

Memoria rerum : expression latine qui signifie « mémoire des choses ».

Yorgos Thèmelis (1900-1976) : un des plus grands poètes grecs du XXe siècle. Il vécut et chanta à Thessalonique, la ville qui donna et qui continue à donner à la Grèce tant de chantres de génie. Thèmelis, c'est Byzance dans sa pure splendeur, la lumière sombre et dorée des
iconostases, le sens somptueux du sacré, le temps fastueux flottant dans la flamme des cierges et des veilleuses des églises. Une poésie de brocart et d'organsin, une mélodie de l'âme, une voix chaleureuse, mystique, sensuelle. Un poète si cher à mon cœur. Je garde toujours en mémoire la fin de son poème « Itinéraire » que je ne puis citer sans pleurer :

« Aussi, quand le soir tombe, entourés de froid, de frayeurs,
Nous lançons des lueurs à l'approche des autres,
Nous nous cherchons les uns les autres dans la nuit ».

Brocart (n.m.) : de l'italien broccato, « broché ». Riche tissu de soie rehaussé de dessins brochés en fils  d'or et d'argent. Synonyme : samit.

Organsin (n.m.) : de l'italien organzino, de Organzi, nom altéré d'une ville d'Ouzbekistan. Fil de soie torse, destiné à former la chaîne des étoffes.


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