Poetic-Verses from ATHANASE

LES COLLINES ENCHANTEES (French)

Le bon texte


LES COLLINES ENCHANTEES

A mon ami d'enfance Boïdio Boïdev
Paix à son âme !

La terre de ton nom, ô mon ami, était la Thrace,
Cette terre de lumière où ton corps repose à présent
Sous les étoiles qui boivent l'intime fraîcheur de l'été,
Toi, mon ami, qui imitais le chant limpide,
Le chant charmeur de l'alouette
Et les plaintives vocalises fascinantes des merles amoureux.

Tu venais l'après-midi,
Debout, souriant sur le seuil de la maison,
Le visage rayonnant de bonté
Entre les ampélopsis enflammés
Et les seringas soyeux,
Eblouissants comme la livrée blanche de l'hiver.
Ton regard, petit soleil de tendresse, me rendait  
Ce que la nuit j'avais perdu dans mes rêves !

Ô toutes ces choses que nous aimions
Et qui nous émouvaient en même temps !
Ô cette symphonie du jour bleu
Qui inondait nos lèvres de voluptés inconnues !

Oui, nous, jeunes âmes thraces
Pures et paisibles, nous admirions
Les vieux livres mûrs dans la florissantes
Bibliothèque de mon père,
Les palais à coupole harmonieux,
Les tapis luxueux,
Prairies peuplées d'étoiles à calices  multicolores,
Les herbiers où, comme des frêle nids de cailles,
S'ouvraient des fleurs bien desséchées,
Fleurs jadis vêtues de mille aurores dorées :
Symphorine, ravanelle, nielle des blés, pulsatille,
Grande berce et cirse acaule, radiaire et mahonia,
Oxyria, coucou, hépatique…

Ô noms fabuleux, noms qui constellaient nos rêves
Des plus horizons de la Terre adornée de splendeurs !
Les cieux qui s'ouvraient, les nuits qui s'endormaient
Dans l'air taciturne! Ô toute cette profusion de trésors !

Nous aimions regarder, éclats de lumière,
Les étoffes somptueuses, les élégants objets rares,
Les vives pierres précieuses qui resplendissaient
Sur les manches finement sculptés des yatagans,
Les représentations grecques avec masques et sistres,
La double flûte de Marsyas odieux à Apollon.

Ô toutes ces choses que nous aimions
Et qui nous émouvaient en même temps !
Ô cette symphonie du jour bleu
Qui inondait nos lèvres de voluptés inconnues !

Nous allions le soir chez notre bon voisin Constantin,
Le vieux cordonnier solitaire, mon maître en espiègleries,
Le rêveur éperdu qui nous révélait les noms escarpés des astres.
Il appelait cela catastérisme, nom grec qui illuminait de ses feux étranges
Nos âmes adolescentes. Il nous parlait
De la foudre cachée au sein de la Terre qui engendre
Les sources thermales, de Typhée qui malmène les constellations
Et sème des troubles dans l'univers,
Changeant en torrents écumeux les montagnes.

Ô fleuve de la Voie lactée,
Ô arcs-en-ciel dans les vergers
Où tout bougeait mystérieusement,
Auguralement !...

Frissons de saules et de hêtres,
Nous écoutions, transis d'émotion,
Le mythe hourrite d'Oullikoummi et Ishtart,
La déesse aux yeux de rubis, mère
Des Babyloniens et des Assyriens,
Qui tentait de subjuguer l'énorme géant de diorite
Par ses chants envoûtants,
En vain d'ailleurs,
Puisqu'il était muet et sourd comme une pierre.

Puis, c'était l'histoire du glacial Borée,
Mugissant en d'harmonieux mugissements,
Faisant chanter la conque,
Passant autour de la taille des jeunes filles de Thrace
Le double lien de ses mains.

Mais ce que nous adorions par-dessus tout, mon ami,
C'était nos promenades, le dimanche et jours de fête,
Sur les collines enchantées
Où des jeunes gens de notre âge
Aux yeux qui brillaient comme mer au soleil,
Tout rouges et tremblant d'amour,
Echangeaient un premier baisers amoureux.

C'est là aujourd'hui,
Enveloppé de touffes drues d'herbe pliant sous la brise
Que tu dors à jamais ! C'est là, ami de mon enfance enchantée,
Que tu écoutes, changé
En capucines sauvages, en soucis jaunes brique,
Le chant argenté des rouges-gorges,
Les discours édifiants des hirondelles affairées,
Les soupirs pythiques des chouettes !

D'autres adolescents à présent rient sur nos collines,
D'autres destins se nouent et dénouent
Sous le parfum printanier des ronceraies,
D'autres larmes brûlent le doux velours de l'air nocturne
Et, dans d'autres veines fumant d'impatience
Le temps déverse son feu fugueux, la nuit !


Vieux, à demi courbé, je marche ce soir
Sur les sentiers connus jusqu'à l'éclatement du cœur,
Je hume, j'entends l'odeur de tes mots
Qui voguent encore, poignants ou rieurs,
Parmi les sanctuaires des lilas.

Revenu dans la vaste vieille maison,
Le cœur brisé comme une lyre
Jetée sur les dalles,
Je pleure solitaire
Sur l'immortelle icône de ton souvenir !
Ô mon Seigneur, va, salue mon ami,
Dépose sur sa tombe
Cet humble bouquets de pensées pures,
Puis, reviens, souris à ma solitude
Et marches dans ma vie
Comme le bon vigneron dans sa vigne !

A Saint-Germain-en-Laye, ce mercredi 30 janvier, Anno Domini MMVIII

Glose :
Ampélopsis (n.m.) : nom latin Ampelopsis brevipedunculata. Vigne vierge. Parente des cissus, cette jolie plante à feuillage panaché et caduc se cultive facilement.
Symphorine (n.f.) : arbuste caduc appartenant à la familles des Caprifoliacées dont fait partie le chèvrefeuille.
Ravanelle (n.f.) : herbe vivace, rameuse, robuste, de 60 à 90 cm de haut, aux pétales blancs veinées de lilas, plus rarement jaune pâle.
Nielle des blés (n.m.) : plante annuelle considérée comme mauvaise herbe qui pousse dans les champs de céréales et parfois dans les terrains vagues aux fleurs solitaires pourpre violacé. Elle appartient à la famille des Caryophyllacées.
Pulsatille (n.f.) : nom latin Pulsatilla halleri. Cette belle anémone apparaît après la fonte des neiges sur les pelouses écorchées et rocailleuses d'altitude. Ses feuilles et sa tige sont extrêmement velues. Sa cousine, la Pulsatille des montagnes, arbore une corolle beaucoup plus foncée, presque noire. Quant à la Pulsatille commune, elle possède des fleurs plus petites et se rencontre à plus basse altitude.
Grande berce (n.f.) : grande plante ombellifère vivace atteignant de 50cm à 1m50 de
hauteur. La plante est couverte de poils blanchâtres assez raides. La tige est rameuse,
sillonnée-anguleuse. Les feuilles sont en touffes à la base et alternes sur la tige. Elles sont grandes, très variables, parfois simplement lobées mais souvent divisées en 5 à 7 larges folioles avec des contours anguleux, parfois étroites et allongées dans certaines formes. Les fleurs sont blanches, groupées à l'extrémité des tiges, en larges ombelles de 12 à 40 rayons. Les pétales extérieurs des fleurs du pourtour de l'ombelle sont beaucoup plus grands que les autres. Synonyme : blancursine, grande berce commune, patte-d'ours, berce spondyle, faux panais, panais de vache.


Cirse acaule, Cirsium acaule, (n.m.) : plante bisannuelle ou vivace appartenant à la famille
des Astéracées qui pousse surtout en montagne, dans les prés ou les pâturages, le plus
souvent sur sol calcaire. L'adjectif acaule signifie qu'elle n'a pas de tige, ou une tige
insignifiante. Longues feuilles d'un vert assez foncé, en rosette étalée. Capitule pourpre
solitaire.
Radiaire (n.f.) : les radiaires du genre Astrantia, de la famille des Apiacées, ou Ombellifères, sont des plantes facilement reconnaissables au fait que leurs ombelles sont entourées par de grandes bractées pétaloïdes étroites et aiguës, disposées en étoile autour de l'inflorescence. Les feuilles sont palmées, comportant de trois à neuf lobes. La ressemblance de l'inflorescence avec une étoile est à l'origine du nom scientifique donné au genre. Synonymes : grande astrance, astrancée, grande radiaire, sanicle femelle.

Mahonia (n.m.) : plante appartenant à la famille des Berberidacées. Le genre est dédié au botaniste américain d'origine irlandaise Bernard McMahon. Ses grappes spectaculaires apparaissent au sommet de l'arbuste. Agréablement parfumées, mellifères, les nombreuses petites fleurs jaune citron sont réunies par 10 à 20 en bouquet superbe.

Oxyria ou Oxirie – Oxyria digyna (n.f.) : son nom vient du grec oxus qui signifie « acide ». Son nom spécifique digyna est composé de di, « double » et de gunê, terme qui désigne la femelle faisant référence à ses deux styles ou stigmates. Plante de la famille des Polygonacées à laquelle appartient l'oseille, très caractéristique des éboulis siliceux d'altitude.  On la reconnaît facilement par ses feuilles en cœur presque rondes.

Coucou (n.m.) : diverses plantes, quoique de morphologies assez éloignées, prennent le nom de coucou ou fleur de coucou. Il s'agit en général de plantes prairiales ayant la particularité de fleurir au moment de l'arrivée du coucou en Europe. Coucou est le nom vernaculaire donné à la Primevère officinale (Primula veris). Coucou ou fleur de coucou désigne aussi le Narcisse jaune (Narcissus pseudonarcissus). Plusieurs Orchidées prairiales (genre Orchis et Dactylorhiza) sont localement désignées sous l'appellation fleur de coucou. Le lychnis fleur de coucou (Silene flos-cuculi) est une plante herbacée vivace de la famille des Caryophyllacées.
Hépatique ou Anémone hépatique – Hepatica nobilis (n.f.) : plante de la famille des Ranunculacées. C'est une plante duveteuse, aux feuilles généralement persistantes pétiolées, en rosette, à trois lobes vert foncé, au revers rougeâtre. Les fleurs sont généralement bleues (parfois aussi blanches, roses ou pourprées) avec de six à dix pétales ovales.
Marsyas et Apollon (le mythe de) : dans la mythologie grecque Marsyas (en grec ancien Μαρσύας / Marsýas) est un satyre phrygien. Joueur de la flûte de Vénus, αυλός / aulós, flûte double dotée d'une anche, il défie Apollon, maître de la lyre. Le concours est présidé par les Muses et le roi Midas. Les Muses déclarent Apollon vainqueur. Pour punir Marsyas de sa démesure (ὓϐρις / hubris, fait d'avoir défié un dieu), l'Archer (un des surnoms d'Apollon) le fait écorcher, et jette sa dépouille dans une grotte, d'où coule une rivière, qui prendra le nom du satyre. Le Marsyas se jette dans le Méandre. Pour avoir tranché en faveur de Marsyas, le roi Midas reçoit pour sa part une paire d'oreilles d'âne. Le concours entre Apollon et Marsyas, symbole de la lutte entre les influences apolliniennes et dionysiennes de l'homme, est un sujet favori des artistes antiques.

Catastérisme (katasterismos) : étude des astres. Les Catastérismes est le titre d'un ouvrage d'Ératosthène, savant d'Alexandrie, où il explique les figures des constellations et les fables des étoiles.
Typhée, Typhon ou Typhaeus : personnage de la mythologie grecque, fameux Géant, fils de Tartare et de la Terre. Il avait cent têtes et vomissait des flammes par ses cent bouches. Typhée fut le chef des Géants qui escaladèrent le ciel et forcèrent les dieux à se réfugier en Egypte, cachés dans des corps d'animaux. Zeus le foudroya et l'accabla sous le poids du mont Etna, ou, selon d'autres, sous l'île Inarime (Aenaria ou Inarime, île du royaume de Naples, sur la côte de la terre de Labour dont elle fait partie), d'où il continue à lancer des flammes. Typhée est le père du Géant à trois tête Géryon et de redoutable Cerbère.
Hourrites (n.m.pl.) : peuple originaire des régions situées au sud du Caucase, appartenant au même groupe que les Uratéens. Il est mentionné dans les tablettes de l'immense bibliothèque d'Ebla (ville située entre Alep et Hama en Syrie) composées de quelque dix-sept mille plaques d'argile en sumérien et en éblaïte, le dialecte local (XXIVe siècle av. J.-C.). Les Hourrites migrèrent dans les montagnes situées au nord de la Mésopotamie, au Kurdistan et dans le Zagros. Indomptables guerriers, ils étaient de farouches adversaires des rois d'Akkad et d'Ur. Ils affrontèrent l'expansionnisme des Hittites au XVIe siècle av. J.-C. Le dieu principal des Hourrites était Teshub, le dieu de l'Orage, qui avait pour parèdre Hebat, et pour fils Sharruma. D'autres divinités hourrites importantes étaient Kushukh, le Dieu-Lune, Shimegi, le Dieu-Soleil, et Shaushka, la déesse de l'Amour. Le panthéon hourrite comprenait également Hepit, le dieu du Ciel, Kumarbi, la Nature, ou encore Astabis, la Guerre et Ishara, l'Ecriture. La mythologie hourrite a élaboré des mythes tels que le Cycle de Kumarbi, (la "Théogonie hourrite").
Diorite (n.f.) : roche magmatique plutonique grenue composée de plagioclase, d'amphibole verte, de mica et de biotite.
Oullikoummi ou Ullikummi : dans la mythologie hourrite, géant de pierre, fils de Kumarbi, la Nature.
Ishtart : la personnalité féminine la plus importante du panthéon assyro-babylonien. Son nom signifie tout simplement déesse. Elle est l'amante parfaite, la consolatrice délicieuse, la mère de la fécondité, la guerrière invincible.
Borée : en grec ancien Βορέας / Boréas, littéralement « le vent du nord ». Dans la mythologie grecque, Borée est le fils d'Eos (l'Aurore) et Astraéos. Il est la personnification du vent du nord, un des quatre vents directionnels. Avec son frère  Zéphyr, Borée descend, par son grand-père Hypérion, de la race des Titans habitant la Thrace. Arrivé à l'âge adulte, il enlève dans un nuage Orithye, la fille du roi d'Athènes Erechthée. Homère raconte que d'une autre union avec une jument, Borée est le père de douze poulains « tellement agiles qu'ils couraient sur les épis sans même les courber ». Cela justifie que ce dieu grec soit souvent représenté en cheval.

Capucine – Tropaeolum majus – (n.f.) : plante annuelle originaire d'Amérique latine aux fleurs jaunes, oranges, rouges. C'était la fleur préférée de ma mère. Elle aimait parler à ses plantes comme à des amies.

Souci – Calendula officinalis – (n.m.) : plante médicinale utilisée comme cicatrisant et anti-inflammatoire principalement contre les coups et les blessures. Le souci officinal est l'une des herbes florales les plus utilisées dans le monde.  De temps immémoriaux, avant même la Grèce antique, le souci a été abondamment employé dans les régions méditerranéennes. Son nom latin de Calendula vient du fait que la plante a une très longue floraison qui perdure à travers les mois ; le terme Calendae désignait le premier jour du mois en latin.


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